En cette rentrée littéraire 2017, Camille Laurens s’attaque au mystère de la Petite Danseuse de quatorze ans de Edgar Degas, œuvre magistrale, universelle, significative etc.
Camille Laurens ne signe pas une biographie, ni une histoire romancée, plutôt une investigation sur le modèle, l’artiste, leur rencontre. Elle mène une enquête sur l’époque, les mœurs, les conditions de vie.
Elle a tout lu, tout épluché pour comprendre, donner vie à ce corps, offrir du mouvement à cette statue figée pour l’éternité. Et c’est une réussite.
Le lecteur est embarqué dans le Paris en chantier de la fin du 19e (merci Haussmann), dans les salons artistiques, dans les taudis du 9e arrondissement, dans les coulisses de l’Opéra. Camille Laurens lève le voile sur les conditions (difficiles et ingrates) des petits Rats de l’Opéra de Paris.
Attention : Camille Laurens n’apporte pas vraiment de réponses sur qui était ce modèle, Marie Von Goetham, perdue dans l’anonymat du temps. Mais elle sait poser les mots justes sur le monde artistique de l’époque, sur la relation spéciale entre un artiste et son modèle, sur cette œuvre grandiose qui les a marqués à tout jamais. Et surtout elle éclaire d’un œil nouveau Degas et sa précocité artistique, le vrai génie qui l’habitait, incompris de ses pairs, loin de l’image de pervers qu’il avait (à tort).
« C’est aussi ce que Degas nous dit avec sa Petite Danseuse, son présent est universel, il le projette dans tous les temps, il informe l’avenir de ses mains. »
Bref, j’ai trouvé ce livre extrêmement intéressant. Bien écrit, truffé d’anecdotes, la lecture en est un réel plaisir. Le seul bémol a été d’apprendre, en postface, que cet essai constitue un volet du doctorat de Camille Laurens intitulé « Pratique et théorie de la création artistique et littéraire ». Je ne sais pas pourquoi mais cette information m’a déçue. Comme si on avait fait les fonds de tiroirs pour trouver quelque chose à vendre. C’est bête – je sais -, ça ne veut rien dire, mais je suis quand même déçue.
Vous l’avez lu ? Vous avez aimé ? Si vous aimez l’art, l’histoire, les enquêtes sans réponses assurées, je vous le conseille absolument.