Etre ici est une splendeur

paula

A l’image de son titre, ce livre est une splendeur. Mon immense coup de coeur estival !

Paula Modersohn-Becker voulait peindre et c’est tout. Elle était amie avec Rilke. Elle n’aimait pas tellement être mariée. Elle aimait le riz au lait, la compote de pommes, marcher dans la lande, Gauguin, Cézanne, les bains de mer, être nue au soleil, lire plutôt que gagner sa vie, et Paris. Elle voulait peut-être un enfant – sur ce point ses journaux et ses lettres sont ambigus. Elle a existé en vrai, de 1876 à 1907.

Texte poétique, au style court, efficace. Chaque mot chante, chaque phrase percute. Rythme soutenu, saccadé, on a l’impression que le temps ne ralentit jamais… Comme sa soif de peinture, ses envies d’artiste. C’est vivant, urgent.

« D’autres choses vont se perdre. Le monde cours à sa perte, vite, pour s’enterrer dans les tranchées de Verdun. Et il reste à Paula cinq cents jours de vie. » 

Ce livre se lit (vite), et se relit avec plaisir, on redécouvre les mots, les sensations. Un vrai bonheur.

« Sa voix avait des plis comme la soie » – citation du poète Rilke, en parlant de Paula.

L’héroïne, Paula Becker, a été une femme d’exception, audacieuse, indépendante, hors de son temps. Une vraie peintre avec une vision picturale bien à elle, du temps des Picasso et Modigliani, où être une femme, peintre de surcroît, ne devait pas être chose aisée. Une artiste qui replace enfin la femme au coeur de ses tableaux : des nus de femmes – enfin libérées du regard des hommes, hors du désir ou de l’envie, et surtout la première femme à se représenter nue et enceinte.

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Tout au long du livre, un réel sentiment d’urgence se dégage. Une insatiété de vivre, de peindre toujours est présent. Jusqu’à sa mort, elle vit fiévreusement chaque instant. Et quelle mort ! Foudroyée par une embolie pulmonaire 19 jours après son accouchement, elle dira son dernier mot « schade » – dommage, avant de s’écrouler.

« Schade…J’ai écrit cette biographie à cause de ce dernier mot. Parce que c’était dommage. Parce que cette femme que je n’ai pas connue me manque. Parce que j’aurais voulu qu’elle vive. Je veux montrer ses tableaux. Dire sa vie. Je veux lui rendre plus que la justice : je voudrais lui rendre l’être-là, la splendeur. » 

Paula Becker a trouvé une voix, un très belle voix, pour se raconter. Merci.

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