« Les Contes de la Folie Ordinaire » sont un recueil de nouvelles écrites par Charles Bukowski.
Ces nouvelles sont des anecdotes, certaines autobiographiques, de la vie de Charles Bukowski ou de son alter ego Hank. Même si la trame est différente, on y retrouve l’atmosphère propre de cet auteur, composée d’alcool, de sexe et de femmes. C’est une immersion dans la vie de paumés, saouls ou lubriques, en prison ou dans une chambre d’hôtel minable.
J’ai lu quelque part que découvrir Charles Bukowski par « Les Contes de la Folie Ordinaire » n’était pas recommandé car ces nouvelles ne réflètent pas l’oeuvre de cet écrivain. Je l’espère.
Je n’ai pas été séduite. Je ne suis pas pudibonde : le sexe , l’alcool, les insultes ne m’ont pas dérangé outre mesure, mais lire le livre d’une traite est une très mauvaise idée. Tout ce sexe, cette violence, ce manque de repères moraux (à mon goût), cette décadence, c’est trop ! J’étais saturée, dégoûtée.
Mais rendons à l’artiste ce qui lui revient…
Derrière le sexe, la provocation et l’alcool, se cache une satire délicieuse et drôle de la société. Complètement décalé, comme lorsque le narrateur parle d’un suicide : « Bon Dieu de merde, je crie à Linda, il a explosé comme une vieille tomate ! (…) Je te jure, chérie, on dirait un gros plat de spaghetti et de bouts de viande enveloppé dans un costard déchiré ! » . C’est loufoque, à côté de la plaque, radical.
Le style de Bukowski est fulgurant. Ici pas de tergivistation. On va à l’essentiel, et ça fait du bien. « Donc, j’atterrissais sur la plage. L’heure matinale m’épargnait le triste spectacle des foules empilées, des montagnes de viande qui jacassent comme une tribu de grenouilles. » L’auteur ne ment pas, tout est dit. « Bukowski pleurait quand Judy Garland passait au Philharmonic de New York, Bukowski a pleuré dans des hôtels minables, Bukowski ne sait pas s’habiller, Bukowski n’arrive pas à s’exprimer, Bukowski a peur des femmes, Bukowski a des aigreurs d’estomac, Bukowski est un grand angoissé, il déteste les dictionnaires, les bonnes soeurs, la petite monnaie, les bus, les églises, les bancs publics, les araignées, les moustiques, les tiques et les tarés, Bukowski n’a pas fait la guerre.«
Certaines nouvelles m’ont plus touché que d’autres : celle de « La plus jolie fille de la ville » qui ouvre le recueil évoque la malédiction d’une prostituée trop belle, sa sensibilité est touchante. Ce que j’aime, c’est le style direct et sans « blabla » de Charles Bukowski, qui amplifie l’émotion en seul mot, une seule phrase. « Dans cette histoire, j’avais été trop réservé, trop distant, trop flemmard. Je méritais de crever et je méritais sa mort. Je n’étais qu’un chien » . Idem, j’ai bien accroché avec « Le Petit Ramoneur » Le thème est plutôt cocasse : cet homme, sous le joug d’une épouse qui veut sauver le monde de la Surpopulation, maigrit, rapetisse pour mesurer à la fin 20 centimètres : « Elle m’a fait descendre jusqu’à vingt centimètres. Elle m’emmenait faire les courses dans son sac, et je pouvais regarder par les trous qu’elle avait percés dans le cuir. »
Par contre, à d’autres nouvelles, je suis restée totalement hermétique. Overdose de sexe, beuveries, « trash »… C’était trop pour moi.
J’ai bien peur que cette incursion dans l’univers Bukowski ne m’ait vacciné contre lui. Et cela risque de durer longtemps avant que les anticorps ne cessent d’être actifs. Dommage.